dimanche 8 novembre 2015

Paroles et Mots : Mikis Théodorakis et Georges Moustaki.

Par Mikis THÉODORAKIS 

Compositeur et Homme Politique

 

Propos recueillis par Chantal Savenier, le lundi 18 mai 2009

Des grands mercis à Mr. Guy Wagner, ami de Mikis Théodorakis, à Mme Rena Parmenidou, secrétaire de Théodorakis, et aussi à Michel Antoine pour son soutien dans toutes mes recherches.


Le 13 avril 1970, enfin libéré, vous arrivez à Paris. A cette époque, Georges Moustaki avait déjà traduit des chansons de Manos Hadjidakis : « Pourquoi mon dieu », « L’acteur », « Le facteur ». Mais il ne s’était pas encore intéressé à votre répertoire. Est-ce à cette date que vous avez fait la connaissance de Georges Moustaki ? Ou bien le connaissiez vous déjà ? Pouvez-vous nous raconter votre première rencontre ? Et comment l’avez connu ?
Mikis THEODORAKIS: "Non, nous ne nous étions jamais rencontré auparavant. Bien sûr, j'avais entendu parler de lui, je connaissais son nom et quelques chansons, mais je ne le connaissais pas personnellement. Après tant d'années, je ne me souviens pas vraiment comment nous nous sommes rencontrés, qui avait pris l'initiative de cette rencontre et de cette coopération. Je me souviens que nous avons eu une très bonne entente, nous sommes devenus très rapidement des amis et nous avons fait les répétitions dans l'appartement de Georges." 






Lors de votre détention, vous avez écrit des chansons. Pourquoi avoir choisi Georges Moustaki pour les adapter en français ?
 Mikis THEODORAKIS: "Comme je l'ai déjà écrit, je ne me souviens pas comment cette coopération a commencé. Habituellement ce type de coopération arrive juste normalement, dans notre cas c'est peut-être parce que nous avions beaucoup de choses en commun, comme par exemple notre descendance grecque."



Une de vos séances de travail a été filmée. Et on vous voit ensemble, dans un appartement, entrain de faire les adaptations des chansons en français. Ce jour là, vous étiez au piano et Georges à la guitare. Comment se déroulaient ces séances ? Etiez-vous toujours ensemble pour travailler l’adaptation ? Etait-ce dans l’appartement de Moustaki ?
Mikis THEODORAKIS: "Oui, c'était dans l'appartement de Georges. C'était l'une des répétitions que nous avons fait ensemble. Depuis, bien sûr, nous sommes restés amis, nous nous sommes rencontrés parfois, mais nous n'avons pas travaillé ensemble, il n'y avait aucune raison bien sûr, mais cela n'est jamais arrivé."





Y avait-il une complicité entre vous ?
Mikis THEODORAKIS: "Oui, il n'y a jamais eu de désaccord ou de querelle. Nous étions des amis très proches et nous avions beaucoup en commun."









 

Dans ce film, on peut également y apercevoir sa maman. Elle était assise sur un canapé, et était très attentive à vos répétitions. L’avez-vous souvent rencontrée ? S’intéressait-elle à l’activité musicale de son fils ? 
Mikis THEODORAKIS: "Je suis vraiment désolé, mais pour être honnête je ne me souviens pas du tout."



Vous êtes vous produit sur une scène ensemble ? Si oui à quelle occasion ?
Mikis THEODORAKIS: "Non, nous ne nous sommes jamais produits ensemble."


 


Vos chansons font toujours partie du répertoire de Moustaki. En juillet 2008, à Cap Roig en Espagne, il a interprété « L’homme au cœur blessé » et dans la suite « Nous sommes deux ».
Continuez-vous à entretenir des relations amicales ? Vous arrive-t-il de vous rencontrer encore ?
Mikis THEODORAKIS: "Oui, nous sommes toujours amis. Bien que nous ne nous voyons plus. Vous voyez, j'ai déjà 84 ans et je ne voyage plus. Mais, en Octobre 2007, nous nous sommes réunis une fois de plus dans une salle de concert à Athènes, pour un concert de Antonis Kaloyiannis, l'un des chanteurs les plus importants de ma musique populaire, qui a également chanté des chansons de Georges Moustaki. Georges était là pour participer au concert, alors j'ai eu l'occasion de l'écouter et de le rencontrer dans les coulisses. Bien que ce fut une rencontre assez rapide, puisque Georges a dû partir rapidement, j'étais vraiment très heureux de le rencontrer une fois de plus après tant d'années."



Le 26 mars 2007, vous avez reçu les insignes de commandeur dans l’ordre de la légion d’honneur, des mains du ministre de la culture Renaud Donnedieu de Vabre à Athènes.
Quelles sont vos relations avec la France ? 


Mikis THEODORAKIS: "C'est très difficile de décrire ma relation avec la France en seulement quelques lignes. J'aurais besoin de dizaines de pages pour cela. Tout d'abord j'y suis allé avec ma femme en 1953 et j'ai étudié la composition et la direction d'orchestre au Conservatoire de Paris avec Olivier Messiaen et Eugène Bigot. J'ai commencé ma carrière dans la musique symphonique et j'ai composé ma musique pour le ballet "Antigone", qui a très bien réussi à Covent Garden. Et là, j'ai reçu les poèmes "Epitaph" du poète grec Yiannis Ritsos et j'ai commencé à écrire des chansons à Paris, fondée sur une grande poésie.
Mes deux enfants sont nés là-bas.
Puis, en 1970, après avoir été libéré de la prison pendant la dictature, je suis allé à Paris, qui a été le point de départ pour l'ensemble de mes tournées dans le monde entier.
Et après 1980, j'ai composé une grande partie de mon oeuvre symphonique.

J'ai beaucoup d'amis là-bas, je ne veux pas citer des noms, parce que je ne veux oublier aucun d'entre eux. Peut-être que je peux faire une seule exception, et mentionner le président Mitterrand, qui m'a honoré de son amitié.
En quelques mots La France est ma seconde patrie." 





Merci Monsieur Théodorakis pour votre gentillesse et pour vos Paroles & Mots qui vont à l'encontre de ce qui m'était raisonnable d'espérer !!!
Pourrais-je un jour expliquer toute ma part de rêve qui s'attache et s'échappe de ces propos? 









 
 
 
 
 
 
 
 
Quelques vidéos : Georges Moustaki et Mikis Théodorakis.
 

Mai 1970 -  Séance de travail  (1ère partie)
Un documentaire de Roviros Manthoulis
"Nous sommes deux"

Mai 1970 - Séance de travail (Fin)
Un documentaire de Roviros Manthoulis
"L'homme au coeur blessé"
 
 1970
 
Août 1973 - "Il est trop tard"
avec la présence de Mikis Théodorakis et de Mélina Mercouri.

Août 1973 -  "L'homme au coeur blessé"
 
Mikis à Berlin Est en 1987
"Imaste Dio"


Mikis à Berlin Est en 1987
 
"Nous sommes deux"